Action de José Aboulker dans l'opération TORCH

 

La victoire du 8 novembre couverture 1

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22 ans, étudiant en médecine. 23 ans, Compagnon de la Libération.  Il est difficile de faire mieux. C'est José Aboulker.

José Aboulker est le fils d'Henri Aboulker, chirurgien des Hôpitaux et professeur à la Faculté de médecine d'Alger, président du Parti Radical local et ancien député maire d'Alger, et de Berthe Aboulker, femme de lettres.

La famille Aboulker comptait parmi les grandes familles israélites algéroises. Elle donna tant des rabbins, dont le grand-rabbin d'Alger Isaac Aboulker, décapité en 1815 sur ordre du Dey que des médecins, comme le docteur Moïse Aboulker, l'un des premiers juifs d'Algérie à faire ses études de médecine en France, que Clémenceau remercia pour son rôle durant le siège de Paris en 1870, ou encore le professeur Pierre Aboulker, urologue qui a opéré le général de Gaulle.

Le débarquement des Alliés à Alger le 8 novembre 1942 constitue la deuxième victoire sur les forces  de l'Axe, après la bataille de Bir Hakeim en Libye ( mai-juin 1942 ) ; Churchill a dit à propos de la bataille aérienne d'Angleterre :
"Jamais dans le domaine de la guerre tant d'hommes n'avaient eu une telle dette à l'égard d'un si petit nombre d'individus ".
"Never in the field of human conflict was so much owed by so many to so few".

On peut en dire autant du groupe dit des "Quatre cents", mené par José Aboulker, qui, en paralysant la haute administration et le commandement français vichyssois d'Alger et leurs centres de communication, a permis le débarquement sans encombres des troupes anglo-américaines aux environs d'Alger ( Sidi Ferruch pour les intimes ) ainsi que l'occupation sans coup férir de l'Algérie, avant que les Allemands n'aient eu le temps de réagir pour livrer une bataille d'Algérie lourde de conséquences.

Le livre "La victoire du 8 novembre 1942" est le livre posthume de José Aboulker, enfin mis en page par Jeannine Verdès-Leroux, et publié grâce à l'aide de la Direction de la Mémoire, du Patrimoine et des Archives du Ministère de la Défense.

La Préface de Jean-Louis Crémieux-Brilhac, Président de l'Association Liberté-Mémoire, suffirait pour faire la recension de ce livre épais de quelque 630 pages. En prime, le préfacier tire dans sa postface les suites effarantes de la farce dramatique qui va s'ensuivre. Mais finalement, "les bustes de Marianne reprennent place dans les mairies d'Algérie tandis que disparaissent les portraits du Maréchal".

Dans la première moitié de son livre,  José Aboulker essaie avec succès de faire comprendre les raisons de la défaite de 1940 : "L'interdiction de toute initiative a déprimé et, à la longue, annulé l'esprit d'initiative". Pis, avant guerre, on en est à la soumission tacite aux Nazis, dont l'ennemi, affiché dans "Mein Kampf", est la France. Le summum est atteint à Munich en 1938. Ensuite, il sera trop tard. On peut résumer la pensée d'Aboulker par deux mots : irresponsabilité et incompétence, sauf de la part des Russes qui, pour attaquer les Allemands ont besoin de l'accord des Polonais pour traverser leur pays. Réponse des Polonais : "Avec les Allemands, nous risquons de perdre notre liberté, avec les Russes, nous perdons notre âme". Finalement l'incurie des uns et des autres aura tout de même fait hésiter Hitler pendant 5 jours avant d'attaquer la Pologne.

Suit une intelligente analyse sur les défauts et les faiblesses des dirigeants français, Aboulker cite de Gaulle :"Chacun ( des hommes politiques français ) d'ailleurs savait qu'il n'était là que pour une courte durée… L'armée se figeait dans les conceptions qui avaient été en vigueur avant la fin de la dernière guerre …"

Le bilan des potentiels donne : deux millions de Français de 20 à 30 ans contre six millions et demi d'Allemands. De plus les Allemands emploient leurs chars correctement, contrairement aux Français, malgré les avertissements incessants du Colonel de Gaulle. Conclusion d'Aboulker : assommés par les boucheries de la Grande Guerre, les officiers généraux ne voulaient pas vraiment faire la guerre, ce sont les jeunes qui ont résisté. 

De son côté, Adolf Hitler, après avoir formé des milliers d'officier pendant le blitz de Pologne, attendait en vain la fin du mauvais temps et en profitait pour renforcer l'armée allemande.( exemples : allongement de la portée insuffisante des canons des chars, décision de faire saisir les ponts par des commandos terrestres ). En raison de la météo, six fois l'attaque contre la France est reportée : quelle maîtrise de la machine de guerre pour ne pas démobiliser la troupe !

Malheureuse Belgique qui, croyant à la neutralité, refuse l'entrée des troupes françaises venant la fortifier, et crie ensuite au loup quand il est trop tard. Le général von Manstein propose à Hitler un plan lumineux d'attaque à travers la forêt des Ardennes, sous réserve que l'armée française vienne au secours de la Hollande et se coupe ainsi de ses bases. Le Führer accepte et profite de l'hiver pour constituer une véritable armée blindée qui s'enfoncera comme un coin dans le flanc de la défense française.

C'est ce que fera le général Heinz Guderian le 13 mai 1940 dans la région de Sedan face à une armée française inapte au combat. ( Nous ne pouvons que confirmer : ayant eu un parent commandant un groupement d'artillerie de 75 près de Dinant, le journal de marche de ses batteries est éloquent : c'est en écoutant par hasard la radio belge qu'un de ses artilleurs a pu prévenir l'Etat-Major de sa division de l'attaque allemande, et puis … les canons de 155 du fort de Dinant n'ont pas tiré pour deux raisons : 
a) leurs servants ne savaient pas s'en servir, 
b) les munitions n'étaient pas du bon calibre ! 
et puis … pendant le franchissement de la Meuse par les Allemands, ses batteries reçoivent l'ordre de repli ! etc. etc. ) Tout cela parce que la forêt des Ardennes était réputée infranchissable par le Haut Commandement français.

Et Aboulker de conclure en le soulignant : "Il n'est pas exagéré de dire que nous perdîmes la guerre ce jour-là", jusqu'au moment où le général Guderian fait arrêter ses blindés à 15 kilomètres de Dunkerque pendant 48 heures, pendant que la Luftwaffe fait pleuvoir ses bombes sur la "tête de pont" qu'il eut mieux valu appeler la "queue de pont" de Dunkerque. C'est le miracle anglais. Tous les bateaux sont bons : remorqueurs, canots de sauvetage, yatchs, bateaux de pêche, péniches, bateaux de plaisance à voile ou à moteur vont évacuer 100 000 soldats jusqu'aux vaisseaux au large de Dunkerque.

Puis c'est percée foudroyante partout, les diatribes du maréchal Philippe Pétain et du général Maxime Weygand contre les Anglais, l'idée tardive du "réduit breton", voire le repli en Afrique du Nord. Tout se passe trop vite avec des généraux dégoutés de la guerre, et quelques unités qui résistent encore, à titre personnel.

Et nous arrivons enfin à l'Algérie, objet du livre. José Aboulker a vingt ans. Pour lui, " l'état de l'Algérie est une parenthèse indispensable. Il faut que les plus jeunes des lecteurs se rendent compte de ce qu'était l'Algérie par rapport à la France au moment  de la Seconde Guerre mondiale. En 1940, l'Algérie est en même temps une colonie et une région française … L'idée d'y préparer une ligne arrière de défense n'est venue à aucun … Parce que pour les Français, au-delà des mers, ce n'est pas la France… Le ministre socialiste des colonies Marius Moutet met en garde :
- Ce serait une lourde erreur de précipiter nos colonies vers une industrialisation irréfléchie. Il ne faut pas créer un prolétariat qui, exploité et mécontent, serait rapidement dangereux"
.

Et Philippe Pétain demande à l'Allemagne ses conditions de paix ! Pas un armistice pouvant être rompue, mais la paix ! Hitler préfère un armistice, qui fera de Pétain son otage, pour empêcher que la flotte française et l'Empire français ne passent aux Alliés. Bien entendu, il y aura une commission de contrôle allemande en civil.

Cette première partie, passionnante, justifie à elle seule la lecture du livre. José Aboulker s'y adonne avec le plus grand soin pour retrouver ses motivations de jeunesse afin de continuer la lutte, d'abord seul puis avec quelques compagnons, et cela en grand stratège qu'il a été.

La suite algérienne au prochain article.

 

Photo jose aboulker

 

Résumé des chapitres précédents :
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En 1940, José Aboulker est un jeune homme de vingt ans, étudiant en médecine, Juif algérien, Français par la volonté de son aïeul qui a obtenu la nationalité française via le Senatus Consulte facultatif de 1865 et non par le décret Crémieux aboli par Vichy. Il va être l'organisateur et l'âme d'une action incroyable : paralyser l'armée française à Alger pendant quelques heures, le temps de laisser débarquer les Américains.

Pendant les quinze dernières années de sa vie, il fouillera l'Histoire de France de l'avant-guerre et de la guerre de 1940, à travers les écrits de tous ceux qui ont eu une responsabilité dans la défaite éclair qu'a subie l'armée française. Pourquoi ? Comme on dit à la télévision après un match de foot, "il a refait le match".

Les chefs de l'Armée d'Afrique obéissent aux directives du Maréchal Pétain, ils se sont "pétainisés" selon l'expression d'Aboulker, et dans la même veine, on peut dire que Pétain s'est "hitlérisé", persuadé qu'il est - dur comme fer - que l'Europe de demain se fera sous la férule d'une Allemagne triomphante, et que dans ces conditions, un strapontin est la meilleure politique à prendre, quitte à combattre, de gré ou de force ses "anciens" alliés et entamer une coopération militaire avec le vainqueur ( par exemple, livraison de milliers de camions, de canons de 155, de 20 000 obus et de carburant, etc. à l'Africakorps ).

Cette lecture extrêmement documentée de l'Histoire des années 1939/1942 change de manière certaine la vision que nous pouvons avoir des mémoires de Philippe Pétain, de Maurice Gamelin, de Maxime Weygand, de la fille de Pierre Laval, et renforce ce que nous pouvons apprendre des mémoires de Churchill et de de Gaulle.

Pour en venir à l'Algérie, le premier acte guerrier majeur est l'affaire de Mers el Kebir.
La marine française n'a quasiment pas combattu, et ses meilleurs éléments sont à Toulon et à Mers el Kebir. Devant le retournement des alliances du nouveau gouvernement français, les Britanniques redoutent un 'hold up" de la flotte de Mers el Kebir par les Allemands, et décident de lancer un ultimatum :
- désarmement ;
- regroupement en Martinique ;
- attaque.

Pour la flotte d'Alexandrie, les choses se passent bien : la femme de l'amiral français est anglaise, la femme de l'amiral anglais est française, un règlement amiable de désarmement est conclu.

En ce qui concerne Mers el Kebir, l'amiral Marcel Gensoul rêve de rééditer la "charge de la Brigade légère", et camoufle le deuxième terme de l'ultimatum à Darlan, chef de la flotte ; c'est un vrai drame, qui laissera des traces profondes dans l'esprit des Français, mais réjouira Hitler.

Les chefs en Afrique du nord, et en particulier le général Charles Noguès sont partagés entre envisager un acte de résistance ou rester fidèle au régime de Vichy. "L'obéissance aux chefs immédiats ne doit en aucun cas être contestée ; elle constitue une obligation impérative dont le respect ne peut être considéré ultérieurement comme une faute."
 ( Maxime Weygand )

Quant à Adolph Hitler, il ne s'intéresse à l' Afrique que pour aider son allié italien Benito Mussolini. Son véritable objectif est d'attaquer la Russie, faute d'avoir débarqué en Angleterre ( même raisonnement que Napoléon 1er ! )

La Résistance est une entreprise solitaire. C'est donc en solitaire que, peu à peu, José Aboulker groupe dans la plus grande discrétion les premiers résistants algériens. Beaucoup de Juifs - la Résistance naissante était riche en frères et en cousins -, peu de "pieds-noirs" - l'adhésion des Européens d'Algérie à Vichy était massive - , et quasiment pas "d'indigènes". Les nationalistes algériens n'ont pas levé le petit doigt pour défendre l'Algérie contre le régime de Vichy. Comme l'a expliqué Mahfoud Sidi Moussa, un membre influent du FLN, à un cousin de José Aboulker "Ce n'était pas leur guerre !". C'est dommage, car les affaires de la région sétifienne et de Guelma auraient peut-être pris un autre développement que celui que l'on connaît.

La lucidité de José Aboulker était sans faille : "Weygand transformait l'armée de la France en armée de Vichy. Elle obéirait à Pétain, elle tirerait sur les Anglais… Les Américains viendront un jour à Alger. L'armée de Vichy les combattra. Nous les aiderons… C'était une réponse déraisonnable. Les Américains n'étaient pas en guerre … Roosevelt n'enverrait pas les boys en Europe."

Ce fut une règle : l'organisation en groupes de cinq, pas plus, absolument cloisonnés. "Il faudra donc occuper les États-majors, les centraux téléphoniques militaires et civils, le commissariat central de police, et arrêter les principaux officiers généraux, le Gouverneur général de l'Algérie, le Préfet et la douzaine de chefs vichystes susceptibles de mobiliser leurs partisans."

Il y eut en fait deux sortes de Résistance. L'une amassée patiemment, à la petite semaine, auprès de patriotes sûrs et apolitiques, les "Quatre Cents",  l'autre conduite par l'industriel Jacques Lemaigre-Dubreuil ( Huiles Lesieur ), peu nombreuse ( le groupe des Cinq ) et persuadée pouvoir influencer favorablement les chefs de l'Armée d'Afrique. Il faut y ajouter le commissaire de police André Achiary dont le rôle dans la libération d'Alger fut important - Rappelons qu'Achiary sera nommé Sous-préfet de Guelma le 22 mars 1945 - , il sauva nombre de résistants de la gégène de la police ( déjà ! ) et devait intervenir dans l'évasion de Fernand Bonnier de la Chapelle, chargé d'exécuter l'amiral François Darlan le 24 décembre 1942 ( pour plus ample information, on peut consulter le site : http://geoffroy.dastier.free.fr/index.htm ).

Les Américains entrent enfin en guerre. Winston Churchill décide le Président américain Franklin Delano Roosevelt de lancer une opération amphibie commune en Afrique du Nord ( Maroc et Algérie ) à la fois pour soulager l'armée d'Egypte et pour servir de test en vue des opérations futures. Bien leur en prend, car les méthodes de débarquement américaines ne sont pas au point, et le risque d'échec est énorme. 

Dessin jose aboulker

 

 Ce dessin des points à contrôler a été dessiné par José Aboulker, qui en a donné une copie à un de ses cousins, avant d'en faire don au Musée du Général Leclerc.

 

 

 

Pour coordonner les actions, le général Mark Wayne Clark décide de se rendre en Algérie, en sous-marin puis kayak ; il rencontre le consul des États Unis Robert Murphy et les Résistants dans une villa isolée de la côte à Cherchell. On dissuade José Aboulker de faire partie du groupe, en cas de capture possible mais aussi peut-être parce qu'un jeune chef de vingt deux ans ne ferait pas "sérieux".

Les Américains comprennent la situation, promettent des armes, qui n'arriveront pas, ce sont les contre-temps de la guerre. Murphy refile même sa voiture et de l'essence à Aboulker, qui en aura certainement besoin.

Mais cet entretien traite aussi du rôle du général Henri Giraud, qu'Abouler apprécie comme suit : " son niveau d'intelligence était très bas. Je n'ai pas été le seul qui s'en soit rendu compte …" Il faut dire que Giraud poussera même la plaisanterie, après son entrée en fonction à Alger, jusqu'à faire emprisonner au Sahara un certain nombre de Résistants, dont Aboulker. Henri Giraud, si tu nous lis !

Giraud ne sera pas capable de "retourner" l'Armée d'Afrique, et d'ailleurs poursuivra la politique anti-juive de Darlan. Mais Roosevelt préférait mettre en place n'importe qui, plutôt que de Gaulle.

Murphy préviendra en son temps Aboulker de l'arrivée de la force naval pour le 7 ou le 8 novembre 1942, puis plus précisément dans la nuit du 7 au 8, exactement comme par hasard le jour des élections aux States. 300 navires partent d'Angleterre et des Etats-Unis et arrivent sans encombres, c'est une grande première grâce au savoir-faire du général Dwight David Eisenhower.

Après le coup d'arrêt de Bir Hakeim fin mai 1942 par les Français Libres,  le général anglais Bernard Law Montgomery déclenche une préparation d'artillerie sans précédent à El Alamein le 23 octobre 1942. Dans le même temps, Hitler use ses forces à Stalingrad et les Américains déclenchent la revanche sur les Japonais à Guadalcanal.

Pour éviter les fuites, l'annonce de l'opération "Torch" n'est faite que deux jours à l'avance, et le fil téléphonique "Police" sera utilisé comme moyen de liaison par les Résistants la nuit "N".

Le 6 novembre, les Allemands savent qu'un convoi allié prévoit un débarquement en Méditerranée. Ce pourrait être Malte ou la Tripolitaine. Les Etats majors français ne se doutent de rien.

7 novembre - 21h - Tous les chefs de groupe, en uniforme, sont chez le père de José Aboulker, 26 rue Michelet. alors qu'ils ne se connaissaient pas deux jours plus tôt. Murphy et ses vice-consuls leur souhaitent bonne chance. Jean Daniel est parti accueillir les Américains sur la plage.
22h 45 : Achiary arrête à la porte des Aboulker le chef de la police politique qui était venu voir, intrigué par le remue ménage.

8 novembre 2h 30 : Début de l'attaque - 13h Demande de cessez le feu par le général Juin. Le départ du garage Lavaysse des 27 voitures et des 6 cars se fait la  veille de 22h 30 à minuit selon les arrivées. Le général Juin et l'amiral Darlan sont empêchés de quitter leur résidence, mais ne sont pas fait prisonniers, comme prévu en dehors d'Alger. Le nouveau commissaire de police centrale qui fait partie des insurgés livre les locaux du commissariat. A l'annonce du débarquement  les policiers du Commissariat Central applaudiront et chanteront la Marseillaise. Les personnalités officielles, alertés par la canonnade, qui vont se renseigner aux commissariats de quartier sont invitées à se renseigner au Commissariat Central, où ils sont "cueillis" !

Le colonel Tubert vient prêter main forte. Les trois centraux téléphoniques sont neutralisés. L'Etat major de Juin est "encerclé" .  Juin prévient Darlan, qui veut envoyer un message à Pétain en lui demandant des instructions. Bien entendu, ce message ne partira pas et aboutira … au 26 rue Michelet.

Le Secrétaire général du gouvernement général de l'Algérie, vichyste féroce, veut se renseigner au Commissariat central. Il est fait prisonnier. Et Aboulker n'est pas tendre pour la majorité des officiers : les officiers supérieurs ont pactisé avec Vichy, les autres leur ont obéi.

L'Amirauté d'Alger est empêchée d'effectuer des destructions du port, ce qui permet aux Anglais de débarquer sans encombres et de foncer vers la Tunisie.

La Préfecture est prise par le groupe de Jacques Zermati alias "B2", qui y pénètre sans encombre avec l'aide de la force publique qui le prend pour un détachement chargé de la défendre contre les gaullistes ! Le Préfet est arrêté dans son lit, suivi de tous les adjoints qui sont consignés dans le salon en attendant. C'est madame la Préfète qui sert le thé à tout le monde. Quand la canonnade retentit, le Préfet est stupéfait. Jacques Zermati le conduit à la fenêtre pour admirer le spectacle.

Palais d'Été. Le gouverneur Yves Chatel, vichyste convaincu, n'y est pas. Il est parti pour Vichy annoncer que tout est calme à Alger. On devine sa fureur en apprenant que le Palais d'Été a été capturé par le lieutenant de réserve Maurice Ayoun. L'opération finie, celui-ci rend ses voitures au garage Lavaysse.

les Anglais débarquent à Sidi Ferruch, quelquefois à 25 kilomètres de leur objectif, … et rembarquent. D'autre arrivent dans la confusion des pilotes de landing crafts qui n'avaient pas appris à piloter … 98 sur les 104 landing crafts seront hors d'usage. Si la plage de Sidi Ferruch avait été défendue, c'eut été la catastrophe.

Résultat : cinq mille soldats sont restés dans leurs casernes. paralysés, mais pour combien d'heures ? Un seul officier réagit, le commandant André Dorange, qui, avec son escorte armée, libère Juin, dont il est le chef de cabinet. et met Murphy aux arrêts. Et se charge de reprendre les centres nerveux occupés, en s'imaginant que les occupants sont des royalistes du "Groupe des Cinq" !!

Alors que les Résistants attendent l'arrivée des Américains ( le premier arrive au 26 rue Michelet ! ) et que l'armée reprend peu à peu le contrôle des édifices publics, la deuxième phase de la bataille du port commence. Vers 11 heures, les batteries du port, désarmées pour cause d'armistice, viennent d'être réarmées pour cause de collaboration, font feu et l'armée contre-attaque avec deux chars légers. Le commando qui vient de débarquer doit se rendre.

Dans la matinée, d'Astier demande à Aboulker "José, arrêtez, arrêtez, je vous en supplie". Il a peur d'accrochages avec l'armée.

Un peu avant 13 heures, les Américains attaquent le fort Duperré où Juin s'est réfugié. Juin charge Dorange de négocier un cessez-le-feu, qui est signé à 17 heures 20, pour Alger, exclusivement.

Jean-Louis Crémieux-Brilhac rédigera le dernier chapitre que José Aboulker n'a pas eu le temps d'écrire, ou n'aurait pas osé écrire. Résumer ce chapitre est simple :
"Ces péripéties font des quatre cents jeunes résistants algérois du 8 novembre les dindons d'une farce dramatique".

ON REFAIT LE MATCH ( en anglais : debriefing)

1 - Jusqu'alors, seule l'Armée de terre française avait perdu la guerre, pas la Marine. Maintenant, c'est fait.
2 - Les finasseries  de Darlan, estimant malin d'avoir deux fers au feu, l'ont conduit à sa perte. 
3 - Weygand a justifié l'adage suivant lequel, dans l'armée, l'intelligence est proportionnelle au nombre des galons. Giraud a justifié l'adage contraire.
4 - Aboulker a manqué le coche en ne traitant pas Darlan et Juin en otages pour négocier avec les Américains. Mais il aurait fallu pour cela qu'il ait eu le soutien des Européens d'Algérie et des "indigènes". En ne le faisant pas, et en rentrant "dans le rang", il a fait que Giraud a pu poursuivre la politique anti-juive de son prédécesseur ;


CONCLUSION

Il devrait y avoir plusieurs "rue José Aboulker" en France et en Algérie, car si le débarquement des Alliés n'avait pas réussi aussi rapidement à Alger, les Allemands se seraient renforcés via la Tunisie, et il y aurait eu une vraie guerre d'Algérie dont les innocents auraient le plus souffert, comme d'habitude, sans compter les conséquences désastreuses au plan international.

Brouillon henri aboulker

Brouillon de la lettre du père de José Aboulker à l'Amiral Darlan pour protester contre le sort réservé aux Juifs.

 

Lettre de dr henri aboulker l amiral darlan

 

Ce brouillon a été retapé par José Aboulker pour une meilleure compréhension

 

Commentaires (4)

gozlan lucien
  • 1. gozlan lucien | 16/10/2016
Et aussi......

............ce mouvement patriotique etait a 80 % compose de juifs indigenes algeriens. Il est certain que Saint Louis a du se retourner dans sa tombe.
Si l on a justement donne la Croix de la Liberation a l ile de Sein, la Troisieme circonscription du Conseil General d Alger a joue un role plus decisif dans l hstoire de la guerre.
Docteur Raphael ABOULKER
gozlan lucien
  • 2. gozlan lucien | 19/09/2016
"........Je veux detruire la stupide legende des bandes de copains de seize a dix huit ans qui auraient ete les heros de l affaire (dans la nuit du 7 au 8 novembre 1942 a Alger).
Mais il ne faut pas confondre histoire de la guerre avec les aventures de Tintin......."
Raphael ABOULKER, cofondateur du groupe paramilitaire dit "Geo Gras" au 7 Place du Gouvernement a Alger.
Article paru sur les Nouveaux Cahiers Francais hiver 74-75, en reponse a l article de Bernard KARSENTY paru sur le meme journal du numero hiver 72-73.
Gozlan Lucien - "Les Oublies du 8 novembre 1942 a Alger"
gozlan lucien
  • 3. gozlan lucien | 16/03/2016
Au ieu de lire ,,,,, pour retarder au maximum l arrivee des Americains...!!!!
Il faut plutot lire.......pour retarder au maximum la reprise en main des forces militaires vichystes hostiles au debarquement des Allies et aider les Americains a investir Alger sans combattre.
Gozlan Lucien
  • 4. Gozlan Lucien | 11/03/2016
Pour apporter un peu plus de lumieres dans le puzzle de Torch, Jose ABOULKER n a jamais ete le "Chef de la Resistance Juive" le 8 novembre 1942 a Alger.
C est les historiens qui ont ecrit cela parce que la plus grande majorite des resistants etaient juifs et jose juif, il en devenait leur "Chef"
C est le vendredi 6 novembre, en presence des chefs de chaque groupe et a la constitution des listes qui vont designer les volontaires pour accomplir chaque mission que Jose ABOULKER declare, a l annonce des noms patronimiques, qu il va y avoir une forte presence de Juifs.
La position exacte de Jose ABOULKER a ete le lien entre "l Etat Major H. d Astier, Rigault" et les chefs de groupes qui eux s occupaient du recrutement. Jose etait inconnu de la base et lui ne connaissait seulement que 3 chefs de groupes.
Dans son livre "La Victoire du 8 novembre 1942", il ecrit a la page 481 et suivantes "....H. d Astier etait le chef de fait, pas de nom, Le nom n a jamais ete utilise par lui ni par moi.....c etait ainsi, il n y avait pas de hierachie definie, donc pas de Chef, parce que la direction de la Resistance d Alger n etait pas une structure organisee....les initiateurs etaient d origine, les chefs de leur premier groupe, puis des groupes rejetons...."
C est au matin du dimanche 8 novembre 42 et en l absence de certains initiateurs du plan d occupation des lieux strategiques (MAST, JOUSSE, VAN HECKE, LEMAIGRE DUBREUIL) pour neutraliser la Totalite de la Ville d Alger que Jose ABOULKER a eu d heureuses initiatives avec ses compagnons, pour retarder au maximum l arrivee des Americains.

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Date de dernière mise à jour : 11/03/2016