Algérie 1962.L'été ou ma famille a disparu

« Algérie 1962, l’été où ma famille a disparu »,

un film D’Hélène COHEN  comédienne et scénariste pour la téléHelene cohen 1

Hélène Cohen

Le lourd passé de la famille d'Hélène Cohen a été dévoilé à celle-ci, dans un cimetière de Perpignan, par le biais d'une inscription sur une pierre tombale. En juin 2002, le jour de l'enterrement de son père, Joseph, 66 ans, la jeune femme découvre cette épitaphe gravée dans le marbre à côté du nom du défunt : « A la mémoire de Mimoun Cohen, son père, Yvonne Cohen, sa mère, Colette Sicsic, sa soeur, Jean-Jacques Sicsic, son beau-frère, disparus en juin 1962 en Algérie. » Autour de la tombe se serrent des personnes aux visages inconnus. Des oncles, tantes, cousins, qu'Hélène Cohen n'a jamais vus et dont elle n'a, surtout, jamais entendu parler. Ce jour -là, cette comédienne et scénariste découvre qu'un pan de son histoire familiale lui a été dissimulé. Non seulement Joseph ne lui a jamais parlé de ses grands-parents paternels, qu'elle pensait morts de vieillesse en Algérie, avant l'indépendance et l'arrivée de la famille en France. Mais elle ignorait que son père avait une soeur aînée, Colette, et que celle-ci était mariée.

Mais que veut dire le mot « disparus » concernant ces parents surgis de nulle part ? « Qu'est-il arrivé à ta famille, à ma famille ? Qu'est-ce que tu cherchais à cacher ? », demande Hélène Cohen en s'adressant à son père, dans le formidable document qu'elle a réalisé sur un drame qu'elle va s'employer à démonter. « Je viens de réaliser que, durant toute mon enfance, j'ai vécu à côté d'un fantôme », lui dit-elle encore. Pour la première fois, elle ose interroger sa mère, Gaby, qui, pendant quarante ans, s'est murée dans le même silence que celui observé par son époux et par les deux autres enfants du couple. C'est elle qui a fait graver l'épitaphe de la tombe. « On supposait quand même que quelqu'un vous en avait parlé, que vous le saviez un peu. Plus ou moins », répond Gaby, avant de se lancer et de sortir des photos de famille jusque-là invisibles. Sur internet, Hélène va retrouver des traces de la disparition de ses proches et apprendre que deux autres personnes se sont évaporées avec eux.

France. Elle sait qu'elle vient, du côté de son père, d'une famille de juifs algériens établie depuis des lustres non loin d'Oran. Elle va apprendre que les Cohen tenaient une boutique de vente de produits en gros, La Gazelle, ouverte par Mimoun, le père de Joseph, dans la ville de Béni Saf. Cet homme qui parlait couramment l'arabe, sa première langue avant le français, avait élevé ses cinq frères et soeurs à la mort de son père. Et réussi à développer un commerce florissant.

Le 29 juin 1962, Mimoun Cohen, 62 ans, son épouse Yvonne, 52 ans, leur fille Colette, 28 ans, et un ami, Jean-Louis Levy, 24 ans, quittent Béni Saf en direction d'Oran. Ils sont à la recherche de Jean- Jacques Sicsic, 38 ans, le mari de Colette, et de Milo Bensoussan, 39 ans, l'oncle de Jean-Louis. Tous deux n'ont pas réapparu depuis la veille. Se déplacer sur les routes est en effet devenu dangereux. Trois mois après la signature des accords d'Evian, le 18 mars précédent, et à quelques jours du scrutin d'autodétermination pour l'indépendance, la guerre d'Algérie s'achève dans le chaos. Les partisans de l'Algérie française regroupés au sein de l'Organisation de l'Armée secrète (OAS) n'acceptent pas le cessez-le-feu et multiplient les attentats meurtriers. En représailles, des membres du Front national de Libération (FLN) se vengent sur des pieds-noirs. C'est dans ce contexte que se déclenche une vague de disparitions de civils européens, apparemment sans distinction d'origine et d'opinion politique. Mimoun, Yvonne, Colette, Jean- Jacques, Milo et Jean-Louis font partie de ces disparus, estimés officiellement à 3 018.

Colette sicsic sur la plage de beni saf 1Jean jacques sicsic 1

 

 

 

 

 

 

Helenne et Jean-Jacques SICSIC sur la plage de Beni-Saf en 1962

Photo DR

 

 

En allant dans différentes régions de France interroger leurs proches, retrouvés à l'enterrement de son père, Hélène Cohen va pouvoir voir et entendre les voix de ceux dont elle porte désormais le deuil grâce aux films en super-8 et aux bandes enregistrées qu'on lui présente. Elle apprendra que ce père, qu'elle a connu si fermé et si secret, était un jeune homme gai et insouciant. Mais le mystère des six disparitions va rester entier. Qui pouvait en vouloir aux Cohen et à leurs amis, proches de la population locale et en faveur de l'Algérie algérienne ? Ont-ils été pour cette raison victimes de l'OAS ? Ou bien de répliques du FLN aux attentats de l'OAS ? Ou encore d'actes de brigandages perpétrés durant la période de non-droit précédant l'indépendance, le 1er juillet 1962 ? Seule réponse : celle de l'état civil, en France, qui les a répertoriés dans la catégorie « présumés décédés »...

De son enquête, Hélène Cohen a réalisé un film  sur l’intimité de cette famille juive amputée à jamais de certains de ses membres alors que la guerre d’Algérie va prendre fin officiellement quelques jours après .

 Sylvie Véran

 

Extrait :

Commentaires (1)

paya jf
  • 1. paya jf | 22/04/2021
3 JUILLET 1962 A AÏN-TEMOUCHENT
JOUR VRAI DE L’INDÉPENDANCE

BON JOUR J’ai toujours spécifié que l’armée des frontières ALN du Maroc (sauf les éléments minoritaires avec la frontière ouverte aux refugies civils après le 19 Mars 62) n’était pas rentrée en Oranie du moins avant l’indépendance et qu’il avait fallu qu’elle réquisitionne des véhicules, camions et bus civils pour progresser jusqu’à Oran après le 5 Juillet faute de logistique spécifique de transport militaires ce qui expliquera un certain retard dans son jeu de "Pompier Pyromane" pour "rétablir l’ordre" et prendre le pouvoir pour commencer en Oranie.

http://popodoran.canalblog.com/archives/2012/02/15/23532788.html

Ajouter un commentaire