Hommage à Tlemcen

Hommage à Tlemcen, à ses Juifs, et à ma grand-mère

 par Suzanne Claire Fhima Ep-Bénichou

Tlemcen place d alger
Quand je pense à Tlemcen, je pense à ma grand-mère Esther et à ses recettes typiques. Par elle, je porte un héritage Tlemcenien qui m'est cher et que je chérirai toujours!

Les nom de ses rues, ses monuments, son histoire, sa musique,et les expressions judéo-arabes, résonnent toujours dans ma tête.

Cette ville était réputée pour être très imprégnée de traditions multiculturelles et multiculturelles. Les Juifs y étaient nombreux. La plupart descendait des expulsés d'Espagne.

Comme dans bon nombre de cités musulmanes où ils avaient habité, les juifs possédaient un quartier, des synagogues, un cimetière, et également des saints vénérés par les croyants de toute religion confondue.

L'histoire de la communauté juive de Tlemcen est ancienne et se mêle intiment à celle de toute l'Algérie. Entre origines, berbères, hébraïques, et Espagnoles, l'histoire ne raconte pas qu'une origine mais lui en donne plusieurs. La plus ancienne est certainement l’autochtone, en l’occurrence la Berbère.

Tlemcen est réputée pour le caractère conservateur de sa communauté d'où le titre (disputé) de "Jérusalem de l'Afrique du Nord".
La refondation de la communauté juive après son extinction sous l'ère Almohade est dû à un médecin originaire d'Espagne, considéré plus tard comme un saint. C'est l'histoire d'Ephraim Enkaoua; le père spirituel des juifs Tlemceniens, qui en échange des soins qu'il a apportés à la fille Du Sultan Tlemcenien de la dynastie des Zianides, il lui a été permis à lui et aux siens de s'installer dans la ville et ainsi fondèrent l'une des premières communautés juives des originaires d'Espagne. Jusqu'à un temps récent sa tombé était un lieu de pèlerinage pour beaucoup de Juifs d'Algérie et Juifs Marocains.

Le vécu Juif de Tlemcen en terre arabe n'est pas différent de celui de la diaspora dans les autres contrées islamiques. Il a eu ses hauts et ses bas, souvent, c'est beaucoup plus des bas que des hauts.

La communauté juive de l'Algérie française se retrouve bouleversée en 1830 et jusqu'en 1962, c'est une suite ininterrompue de bouleversements qui changèrent à jamais le visage des israélites de ce qui était appelé les possessions Françaises en Afrique avant que Schneider ne décide en 1839 de donner un nom à cet ensemble territorial devenu l'Algérie.

La conquête et la colonisation Française accentuées par le décret Crémieux accélèrent l'assimilation des juifs. L'adoption des valeurs de la république Française firent connaitre à ces anciens indigènes une ascension sociale, spirituelle, spectaculaire. Les juifs n'étaient ni indigènes ni dhimmis mais des citoyens français totaux ! Une première en Afrique du Nord et dans le monde Arabe. L'Algérie était Française, un territoire sous-découpé en trois départements Français. Naître à Nice ou à Tlemcen, c'était la même chose. C'était naitre en France !

Les musulmans, futurs citoyens algériens, refusant d'abandonner le statu personnel légiféré par le Coran, se sont condamnés eux même au code de l’indigénat qui puise ses bases de la charia.

Après des siècles passés sous la tyrannie arabo-musulmane, les juifs, grâce à la France, la généreuse mère Patrie, ont retrouvé une dignité et une justice qu'ils avaient perdues.

Pour ces raisons, par gratitude, par loyalisme, et par amour dévoué, le patriotisme de la communauté Israelite Française d'Algérie n'était pas des moindres. Toutes les familles Françaises juives des departments algériens comptaient des morts pour la patrie lors des premières guerres mondiales. Pour ces familles c'est une fierté.

Ma - grand-mère, la défunte Gabriéla Bentolila, a perdu ses deux jeunes fils lors de la première guerre mondiale. Elle consolait son chagrin par la fierté d'avoir donné du sang frais au pays qui fait d'elle une Citoyenne ! Cette fierté qui était partagée par tous les membres.

Le sentiment d'être Français comme ailleurs a toujours été prédominant dans les foyers Juifs tlemceniens. Il n'a même jamais été effleuré même sous-vichy et ses lois fascistes. La foi en la France fit que les Juifs ont préparé le terrain aux alliés lors de l'opération Torch ! Peu de temps après, le débarquement, les lois raciales ont été abolies. Les juifs pouvaient désormais réintégrer l’enseignement, l'activité commerciale, et la fonction publique desquelles ils en ont été chassés.

L'appartenance à la France n’empêchait pas les Français Israélites de continuer à perpétuer leur héritage culturel commun avec les algériens. Les familles juives et musulmanes faisaient les mêmes cadeaux, s'habillaient de la même manière et fredonnaient les mêmes airs de musique.

Les indigènes, arabes et berbères, de culte musulman, étaient noyautés par des idées nationalistes, inculquées par certains activistes aux penchants idéologiques communistes et Nasseriens. Le FLN s'en est inspiré pour se créer. Pendant plus de 7 ans, une guerre sans merci était livrée aux communautés juives et chrétiennes sous la houlette d'une guerre de libération qui n'était autre qu'une épuration raciale et religieuse de toute minorité non-islamique.

Les juifs comme les chrétiens en ont souffert. Tlemcen et sa proche région comptent des martyrs Juifs de la barbarie des nationalistes algériens, à titre d'exemple le tragique sort de la famille Haziza de Nédroma. Des juifs naifs ont cependant activement collaboré et aidé le FLN de façon directe comme de manière subtile dans ses actions. Ils pensaient que les Juifs du fait de l'ancienneté de leur présence avaient une place naturelle et garantie dans l'État que nationalistes projetaient de mettre en place. La lucidité de la communauté et de ses membres a fait qu'ils ont compris ce qui en serait réellement. Que la propagande des modérés du FLN n'était que fausse. Cette même organisation qui disait des Juifs qu'ils étaient de patriotes algériens de vielle chose posait des bombes dans les synagogues et les quartiers Juifs. Alors comment les croire ? Que faut-il en retenir ?

Cette incohérence entre le discours et l'action ont fait comprendre aux plus algériens des Juifs que de l'Algérie nouvelle ils n'en feraient pas partie.

Sidérés par la barbarie du FLN, écœurés par les fausses promesses françaises, à la déclaration de l'indépendance, la majorité des Français juifs de Tlemcen, comme ceux de toute l'Algérie quittèrent massivement en laissant tout derrière eux et dans la précipitation un pays qu'ils ont peuplé depuis plus de 2000 ans. Aujourd'hui Tlemcen comme la Varsovie post-1945 est Judenrein. Une communauté millénaire s'est à jamais éteinte.

Les descendants des Achache, des Bénichou, des Touati, des Dray, des Benghouzi, ...etc, sont Français, Israéliens, peut être Américains, parfois Canadiens ou Argentins, mais plus jamais Tlemceniens,,, c'est une communauté révolue !

Tlemcen suzane claire fhima

Tlemcen suzane claire fhima 2

Ajouter un commentaire

 

Date de dernière mise à jour : 07/10/2019