Le tailleur de Relizane

de Olivia ELKAIM Editions Stock 19 aout 2020

Le tailleur de relizane couvertureResume 4eme de couverture

Le Tailleur de Relizane

Relizane, pendant la guerre d’Algérie. Lorsqu’en pleine nuit, on frappe à la porte, Marcel, le grand-père d’Olivia Elkaim, craint pour sa vie et celles de sa femme et de leurs deux enfants. On lui enfile une cagoule sur la tête, il est jeté dans un camion et emmené dans le désert. Va-t-il être condamné à mort ou gracié ? Il revient sain et sauf à Relizane trois jours plus tard, et ses proches se demandent quel est le secret de ce sauf-conduit. A quoi a-t-il collaboré ? Quels gages a-t-il donné et à qui ? Viviane, son épouse, ses frères, sa mère, ses voisins, tous questionnent le tailleur juif. Mais il garde le silence. Quand un jeune apprenti arabe se présente devant son échoppe, Marcel comprend que tôt ou tard, il lui faudra quitter son pays natal. 

Après ce début d’une folle intensité romanesque, Olivia Elkaim retrace l’histoire de sa famille, l’exil des siens, leur arrachement à cette terre africaine, et leur fuite chaotique vers une France où rien ne les attend - ni confort, ni sympathie, ni même aucune aide administrative. 

Ces valeureux que le soleil caressait il y a peu, deviennent des réprouvés qui ne connaîtront que l’ombre d’une cave humide à Angers. Les grands-parents d’Olivia Elkaim, Viviane et Marcel, sont deux magnifiques personnages, entre Albert Cohen et Anna Magnani, qui ne cesseront de rêver d’échapper à cette triste France. 

Au-delà de tout ce que nous savons du retour d’une famille pied-noire en métropole, au-delà du drame humain, familial, politique, souvent commenté par les historiens, Olivia Elkaim explore sa part algérienne, juive, lyrique, à la fois enchantée et hantée, que son père Pierre avait tenté en vain de lui transmettre.
Par ce livre qui rend hommage à ses ancêtres, et à travers la photographie jaunie d’une grand-tante, retrouvée par hasard dans le cimetière juif de Relizane, elle se révèle aussi à elle-même. 

Olivia ELKAIMOlivia elkaim photo des grands parents

Olivia ELKAIM lors de son interview par Anne Singer pour AKADEM. En arrière plan la photo de ses grands parents

Olivia elkaim bio

Olivia Elkaim née en 1976 est journaliste politique mais également spécialisée en bioéthique.

Ses précédentes publications 

- Les graffitis de Chambord (GRASSET 2008)

-11 Femmes (J’AI LU 2008)

-Les oiseaux noirs de Massada (GRASSET 2011)

-Un convoi pour Juan les pins (MOTEUR 2011)

-Nous étions une histoire (STOCK 2014)

-Sur le divan (collectif )STILUS 2017

-Je suis Jeanne Hebuterne (STOCK 2017)

Marcel ELKAIM, le tailleur de Relizane

Le grand pere marcel elkaim

Relizane. Un gros bourg agricole, au débouché de la vallée de la Mina, un des affluents du Chétif grossi par les eaux du barrage de Djidjioula : peut-on imaginer, situé à mi-chemin de Mostaganem et de Tiaret, à 120 kilomères d' Oran, village plus prospère ?

Relizane les terres agricoles

Relizane - Tout autour les Terres agricoles

Tout autour, ce n'étaient que grandes exploitations, docks, silos et usines de traitement agro-alimentaire : la vigne devenait vin, le blé pâtes alimentaires, les fruits confitures.

La ville, à angles droits et maisons basses, ne s'animait que le jeudi, jour du marché. Mais on y venait detoute la région, de l'Hillil comme de Perregaux et l'on y restait parfois le week-end.

Comme les commerces, les hôtels et les brasseries foisonnaient : Hôtel de la Paix, Hôtel de Paris, Hôtel Moderne, restaurant de Bordeaux.

D'après Elisabeth Fechner ( Le pays d'où je viens, Calmann Levy - 1999 )
 
Relizane plusieurs vues

https://www.judaicalgeria.com/pages/relizane.html

Voir et ententendre l'interview de Olivia ELKAIM par Anne Singer pour AKADEM avec le lien :

https://akadem.org/magazine/magazine-culturel-2020-2021/le-tailleur-de-relizane/19085.php

 

"Le tailleur de Relizane" . Extrait de quelques pages du début du roman

Marcel et Viviane étaient de la première génération de Juifs, en Algérie, à s’assimiler par des prénoms passe-partout d’Européens. Ils avaient donc choisi pour leurs enfants des patronymes bien français, comme les leurs.

Mais pour les registres, à la synagogue, et pour faire plaisir aux anciens, ils les avaient aussi appelés Joseph et Moïse, comme les grands-pères de chaque côté de la famille.

Marcel ne voulait pas faire d’histoires.

 Malgré les coups contre la porte vitrée, les enfants ronflent au pied du lit matrimonial, sur des matelas au sol. Dans ce deux-pièces que Marcel avait acheté pour leur mariage, sept ans auparavant, il n’y a qu’une seule chambre.

Viviane n’avait accepté de quitter Oran, sa mère et ses sœurs, le bel appartement de la rue Monseigneur-Cantel, qu’à une seule condition : à Relizane, ils n’habiteraient pas avec Lella, la mère de Marcel, entassés dans son logement minuscule, où il n’y avait aucune commodité, pas même le gaz, et juste une lampe à pétrole pour s’éclairer.

Déjà, il lui faudrait vivre dans cette ville à la si mauvaise réputation. Plaine aride, désert brûlant huit mois de l’année qui obligeait à se changer deux fois par jour et à dormir enroulé dans des draps mouillés. Elle devrait supporter cette Cayenne soumise aux invasions de sauterelles, de moustiques gros comme le pouce et où sévissaient encore le choléra et les épidémies de typhoïde.

Marcel avait dépensé toutes ses économies, ses paies de soldat, sa prime de démobilisation de mille francs, jusque-là scrupuleusement conservées au comptoir d’escompte de Relizane, dans cet appartement petit mais fonctionnel, pour satisfaire sa jeune épouse.

– Ouvre, Marcel !

Une voix d’homme, impérative.

Viviane s’est redressée, blême. Sa chemise de nuit en coton laisse entrevoir ses seins lourds, aux aréoles brunies et élargies depuis la naissance des enfants.

Elle mord le drap cousu de leurs initiales, V. & M.

– Tu ne vas quand même pas leur ouvrir, Marcel ?

Le souffle court, elle répète :

– Tu ne vas pas leur ouvrir ?

 Ils défonceront la porte, rien ne leur fait peur.

Ils frappent d’abord quelques coups, puis cassent, c’est ainsi. Parfois même ils égorgent les enfants, éventrent les femmes enceintes. On retrouve des cadavres de jeunes appelés, défigurés, dévorés par les vautours, dans des trous caillouteux. Corps mutilés, sexes tranchés

Viviane ne lit-elle jamais L’Écho d’Oran, La Dépêche algérienne, leurs manchettes affichées en lettres de sang sur la vitrine du bar-tabac Le Bordeaux tenu par Maxime, l’un des quatre frères de Marcel ?

Au sud de Relizane, treize militaires venaient d’être assassinés à coups de machette. Des enfants qui jouaient à chat étaient tombés sur les dépouilles abandonnées, nues, dans un ravin. Uniformes et armes dérobés…….

 

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Date de dernière mise à jour : 12/09/2020