Us et Coutumes d'Alger

CERTAINS DES US ET COUTUMES D'ALGER

Caroline Elishéva REBOUH

J'ai, récemment, eu l'opportunité de me souvenir de certaines coutumes que nous avions et partagions à Alger à la faveur des dernières fêtes de Tishré mais aussi à l'occasion d'évènements familiaux heureux et je voudrais ainsi les partager et les faire revivre dans ce site qui nous est cher et nous permet de revivre cette vie privilégiée que nous avons partagée sur cette terre qui nous paraissait nôtre mais qu'on a arraché de notre âme : l'Algérie………..

LA NAISSANCE :

Dès qu'un enfant naissait, on déposait sous le matelas ou sous l'oreiller du nouveau-né un canif (fermé pour éviter des dommages) et un sachet avec du gros sel ainsi qu'un livre de tehilim (psaumes) contre le mauvais œil, et contre les cauchemars de l'enfant.

Ainsi, lorsqu'un enfant naissait pour la plus grande joie et fierté de nos familles, et que la jeune maman emmenait le nouveau-né chez les Grands-Parents ou d'autres personnes, l'enfant ne ressortait pas "les mains vides" de cette maison d'où il ressortait car la coutume voulait que la maman reparte chez elle avec un "filet" à provisions plein de bonnes choses symbolisant abondance, richesse, bonheur et réussite ainsi, on remettait à la maman : semoule, ail; farine, sucre, œuf et on ajoutait parfois du miel et/ou une enveloppe contenant un peu d'argent…. Tout ceci pour que l'enfant et sa maman repartent avec des promesses de richesse.

LA PENDAISON DE CREMAILLERE :

Lorsqu'un couple décidait d'emménager dans un nouvel appartement, on commandait un shohet (sacrificateur) et on allait acheter un coq (ou une poule) que le shohet sacrifiait et il lisait alors un texte (raccourci) pour effectuer en quelque sorte un "rachat" des fautes (de tous les côtés du propriétaire ancien et nouveau), puis on fixait au moins la première mezouza (parchemin sur lequel se trouve inscrit le texte du "shéma Israël" profession de foi juive) à l'entrée de l'appartement/maison et, pour les personnes plus religieuses étaient fixées des mezouzoth supplémentaires aux autres linteaux de chambres à coucher/salle-à-manger/ salon/ cuisine etc… Certains imprimaient leurs mains sur un papier après les avoir "humectées" dans un peu de sang de la volaille.

LA PSHISHA et le BKHOR :

Après avoir sacrifié la poule, (ou le poulet qu'en général on remettait à une famille nécessiteuse), on déposait dans chaque chambre (derrière la porte de celle-ci) un mélange de produits évoquant l'abondance, la douceur, le bonheur : semoule, sucre, huile d'olives, henné, khol (fard pour les yeux). Puis on refermait l'appartement et on revenait le lendemain pour balayer le tout et nettoyer (certains allaient chercher de l'eau de mer pour laver le sol de la nouvelle habitation) ensuite on allumait des braises sur lesquelles on faisait fumer du "bekhor" (on en trouve aujourd'hui dans toutes les "épiceries orientales" ce qui embaumait les pièces où on faisait pénétrer le "kanoun" avec ces aromates…

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LE VERRE D'EAU :

Nous nous souvenons tous de ce fond de verre d'eau que nos mamans ou nos grands-mères versaient après que nous sortions de la maison pour un séjour plus ou moins long en dehors du domicile. Certaines demandaient que l'on revienne en arrière, pour être sûre que l'on reviendrait…

LES INDESIRABLES :

Lorsque des visiteurs s'éternisaient (plus que de raison), il y avait les partisans du balai et ceux des épingles. Explications : 1- le plus simple était d'envoyer l'un des enfants chercher le balai et de le placer brosse en haut derrière la porte d'entrée et, paraît-il, c'était infaillible pour que le visiteur se sente soudain mal à l'aise et se dresse pour prendre congé.

2- le deuxième stratagème était de renverser quelque chose près de la personne puis d'envoyer un enfant ou de s'absenter soi-même un instant pour ramener un balai et balayer ce qui fut renversé, la personne alors, mal-à-l'aise prenait congé.

3- Quelqu'un de la maison prend des épingles dans la paume de la main et les fait remuer en ouvrant et fermant la main et, l'intrus ne tarde pas à partir.

A LA VEILLE DE KIPPOUR OU LORS DES VISITES AU CIMETIERE :

A Alger, lorsque nous allions nous recueillir sur les tombes des disparus, nous avions pour coutume, en sortant du cimetière de nous laver les mains évidemment sans sécher nos mains avec une serviette ou un mouchoir, puis, nous ne revenions pas à la maison immédiatement, nous faisions un petit détour pour rentrer dans un café et y boire quelque chose ou rentrer dans une boulangerie et acheter un pain… La raison en est toute simple : c'est que quelqu'un qui est en deuil (que D nous en préserve), et qui se rend au cimetière pour rendre hommage à un défunt pour lequel on observe un deuil, l'usage veut qu'on ne se rende nulle part car l'endeuillé n'a aucune envie de se distraire. Ainsi, entrer dans un commerce quel qu'il soit et acheter quelque chose démontre du fait que grâce à D nous ne sommes pas dans ce cas.

L'EAU DE MER et LE SEL :

Pour nous qui habitions, en bordure de mer, l'eau de mer faisait partie intégrante de notre vie et il était courant, lorsque quelqu'un craignait le mauvais œil ou craignait une contamination, d'aller remplir quelques bouteilles d'eau de mer pour laver le sol de la maison et se sentir mieux (moralement surtout).

Mais, il y avait aussi le sel qui ne servait pas qu'à assaisonner nos aliments mais à faire "avorter" le mauvais oeil !! Ainsi, une voisine s'extasie sur votre nouvelle robe ou sur le jeune bébé…. Qu'à cela ne tienne "on va tourner le sel" !!! Cette pratique consistait à prendre une petite cuillerée de sel dans la main, puis, on refermait les doigts dessus et on faisait tourner le sel au-dessus de la tête de la personne visée et assise (pour permettre une manipulation plus aisée, bien entendu ! On tournait trois fois dans un sens puis trois fois dans l'autre et une fois encore en inversant le sens et on implorait HaShem avec le mérite de Rabbi Shimon bar Yohay ou d'un autre saint vénérable de sauver untel du mauvais œil puis, on crachait sur le sel et on le jetait aux toilettes !!!

LES SFENJ OU LES BEIGNETS :

Lorsqu'un jeune enfant perçait ses premières dents c'était l'usage on faisait frire de la pâte pour croquer dans des beignets chauds et délicieux.

Il en était de même pour la jeune-fille qui devenait pubère et la grand-mère en profitait pour offrir une première pièce du futur trousseau (comme une serviette de toilette)…

Il est évident qu'il existe autant de coutumes que d'individus et la liste peut être allongée à l'envie.

Caroline Elishéva REBOUH

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Date de dernière mise à jour : 05/03/2022